Les coproduits de la mer
Une ressource à valoriser

Prestations ACT food - Publié le 25/10/2024

Partager :

Les coproduits de la mer révèlent aujourd’hui un vrai potentiel. De l’alimentation à la cosmétique, en passant par la santé, la valorisation de ces « déchets » ouvre la voie à une économie circulaire innovante. Faisons le point sur la question avec Véronique Bonnier, Responsable R&D Biotech chez IDMer. Ou comment cette évolution transforme l’industrie de la pêche, alliant performance économique et durabilité environnementale.

Qu’entend-on par coproduits de poissons ?

Le terme « coproduit » n’a pas de définition réglementaire précise, mais il est largement utilisé dans le secteur de la pêche et de l’aquaculture pour une valorisation sur le marché alimentaire. Il permet de faire la distinction avec les « sous-produits animaux » qui englobent tous les produits issus d’animaux qui ne sont pas destinés à la consommation humaine directe comme les sous-produits d’abattage d’animaux terrestres.

déchets poissons

Concrètement, les coproduits de poisson représentent tout ce qui reste après l’obtention des filets que l’on trouve chez le poissonnier. Cela comprend la peau, l’arête centrale avec la tête (ou sans), les écailles, les chutes de découpe des filets, le cartilage, etc.

Ces coproduits sont loin d’être des déchets sans valeur. Au contraire, ils sont riches en protéines, en minéraux, en lipides intéressants. C’est cette richesse nutritionnelle qui en fait une ressource potentiellement précieuse.

 

Que devient actuellement cette ressource ?

Actuellement, la majeure partie des coproduits est collectée pour l’obtention de farines de poisson. Mais depuis quelques années, ils sont aussi valorisés sur d’autres marchés à plus haute valeur ajoutée comme la nutrition humaine. Cette valorisation ne représente pas la plus grande part car il existe des freins logistiques importants. En effet, pour ce marché, les coproduits doivent être triés, collectés selon les normes d’hygiène propres à l’alimentation humaine et conservés au froid pour être utilisés rapidement ou doivent être surgelés. Or cette ressource est très dispersée sur le territoire et il n’existe pas de structure capable de collecter et centraliser toutes ces opérations. En conséquence, de nombreux petits mareyeurs ne valorisent pas encore leurs coproduits.

Chez IDmer, cela fait plus de 30 ans que nous travaillons sur ce sujet et notamment sur la recherche de solution avec les mareyeurs pour valoriser ces coproduits qui représentent une ressource financière non négligeable. Nous avons établi des partenariats avec certains, à qui nous fournissons des bacs propres pour la collecte dans le respect d’un cahier des charges. Ces bacs sont fermés, mis sous glace, conservés et transportés au frais pour maintenir une qualité alimentaire. Mais c’est un système qui reste difficile à mettre en place sur tous les sites de collecte et de transformation.

Quel intérêt les coproduits peuvent-ils présenter pour les mareyeurs ?

L’intérêt principal est financier. Actuellement, quand les coproduits partent pour être transformés en farine animale, leur valeur marchande est de quelques dizaines d’euros la tonne. En revanche, si on demande aux mareyeurs de trier ces coproduits pour des applications plus valorisantes, le prix peut être de quelques dizaines d’euros de centimes le kilo. Pour les mareyeurs, c’est donc une source de revenus complémentaire à leur activité principale.

poissons

Une fois ces coproduits récupérés, quelles sont les perspectives de développement ?

Il existe plusieurs pistes de valorisation et le champ des possibles est vraiment large. Tout d’abord, il y a des procédés de séparation mécanique qui permettent de récupérer le reste de chair sur les arêtes de poissons. On obtient ainsi des pulpes qui peuvent être utilisées dans l’agroalimentaire.

IDmer s’intéresse particulièrement aux molécules qui peuvent avoir une activité bénéfique pour la santé. Par exemple, les peaux de poisson sont riches en collagène. Les arêtes contiennent du calcium et du phosphore. On trouve aussi des polysaccharides qui peuvent être bénéfiques pour les problèmes articulaires.

Nous appliquons des procédés d’hydrolyse enzymatique sur ces coproduits pour générer des peptides, qui peuvent avoir un intérêt biologique et un effet bénéfique sur la santé, que ce soit sur le stress, l’élasticité de la peau, etc.

Concrètement, nous obtenons une sorte de « soupe » sur laquelle nous appliquons différentes techniques de séparation et de filtration. Cela nous permet de séparer l’huile, les arêtes et les protéines présentes dans le coproduit. Ensuite, nous déshydratons le produit pour obtenir une poudre qui aura une activité biologique spécifique et qui sera utilisée dans des compléments alimentaires. Nous avons ainsi développé de nombreux ingrédients avec des clients et partenaires qui sont sur le marché des compléments alimentaires, pour des produits orientés vers le bien-être ou le « bien vieillir ».

coproduit poisson

Quel intérêt les entreprises ont-elles à utiliser ces coproduits ?

Il y a plusieurs facteurs qui motivent les entreprises à s’intéresser aux coproduits. Tout d’abord, il y a un intérêt environnemental évident : utiliser ces coproduits permet de réduire les déchets. Et c’est un argument de plus en plus important.

Ensuite, il y a un intérêt économique. Certaines entreprises cherchent à développer un ingrédient bien précis, et les coproduits représentent une matière première peu coûteuse. Plutôt que de jeter ces matières, on peut les valoriser et en tirer un bénéfice économique.

produits anti âge

Ces dernières années, nous avons observé une évolution intéressante. Avec la pression environnementale croissante, de plus en plus d’entreprises s’intéressent à ces coproduits. Les entreprises nous disent : « Nous avons ce coproduit, nous ne savons pas quoi en faire, mais nous aimerions le valoriser au mieux. » Notre rôle est alors d’explorer les différents marchés potentiels pour cette matière.

En dehors de la nutrition humaine, il existe d’autres secteurs d’application pour ces coproduits comme l’utilisation dans des matériaux ou en agriculture. La recherche de produits naturels en substitution des produits phytosanitaires est un domaine porteur pour les coproduits. Nous avons des partenariats, notamment avec Vegenov, pour tester des extraits obtenus à partir de coproduits en biocontrôle et biostimulation des plantes. C’est un domaine très prometteur.

 

Comment est né cet intérêt pour les coproduits chez IDmer ?

L’intérêt d’IDmer pour les coproduits remonte effectivement à plus de 30 ans. La situation géographique de Lorient, avec son importante activité portuaire, a joué un rôle crucial. À l’origine, IDmer a été créé en partenariat avec l’Ifremer et des acteurs locaux. L’idée était d’aider les professionnels de la mer à mieux valoriser leurs ressources. Cela concernait bien sûr la partie noble du poisson, pour apporter plus de valeur ajoutée à la matière première. Mais il semblait logique de s’intéresser aussi à tous ces « déchets » générés par la découpe.

Avec la culture croissante de la transformation et de la découpe du poisson, il nous semblait dommage que le mareyeur ne valorise qu’une partie du poisson acheté entier.

Aujourd’hui, quel type d’entreprises visez-vous et que leur proposez-vous ?

Chez IDmer, nous nous sommes concentrés sur la valorisation des coproduits pour les marchés la nutrition et des compléments alimentaires. Nous travaillons avec des entreprises qui veulent développer une alimentation ciblée, que ce soit pour les seniors, les sportifs, ou pour ceux qui cherchent à développer un ingrédient spécifique.

En parallèle, nous sommes sollicités par des entreprises de l’agroalimentaire qui génèrent des déchets ou des coproduits qu’ils veulent mieux valoriser. Nous pouvons donc créer des liens entre ces différents acteurs.

séchage idmer copie

Notre approche est la suivante : en fonction des caractéristiques attendues par le client, nous examinons quelles matières premières pourraient correspondre à leur demande. Nous mettons au point le procédé d’obtention de l’actif ou de l’ingrédient au stade laboratoire, nous réalisons ensuite la montée en échelle du procédé et validons la faisabilité industrielle. Nous pouvons ensuite accompagner notre client en réalisant des productions de l’ingrédient développé afin qu’il puisse le tester sur le marché.

Bien que nous nous concentrions sur la valorisation de la matière et le développement d’ingrédients pour l’alimentation et la santé, nous ne nous interdisons pas d’explorer d’autres marchés comme les matériaux ou la santé des plantes.

Quel type de prestations proposez-vous par rapport à ces coproduits ?

Notre offre de services est assez complète. Tout commence par une phase exploratoire d’étude bibliographique en lien avec le coproduit et les actifs potentiellement intéressants. Nous caractérisons et analysons ensuite le coproduit en question avant de réaliser des tests en laboratoire d’hydrolyse enzymatique et de fractionnement.

L’objectif est de développer et de tester des procédés pour l’obtention d’un ingrédient actif. Si nous identifions quelque chose de prometteur, nous passons à l’étape suivante de tests à l’échelle pilote, ce qui nous permet de tester le procédé à plus grande échelle.

machine idmer 1

L’étape suivante est la prestation industrielle. Nous pouvons fabriquer l’ingrédient à partir des coproduits à une échelle industrielle. Si notre client a la capacité de réaliser le processus en interne, nous pouvons l’aider à transférer le processus chez lui. Sinon, nous pouvons héberger ses productions dans la mesure de nos capacités.

En résumé, nous pouvons vraiment accompagner nos clients de l’idée initiale, en passant par la phase exploratoire en laboratoire, jusqu’à la prestation industrielle de fabrication d’un actif.

De plus, il est important de noter que nous avons aussi des partenariats avec d’autres centres techniques. Nous pouvons ainsi proposer un accompagnement dans le montage de projets, y compris la recherche de financement. Et, si nous n’avons pas toutes les capacités requises en interne, nous pouvons trouver des partenaires pour nous accompagner sur le développement et monter des projets collaboratifs impliquant plusieurs acteurs.

Notre objectif est vraiment d’offrir un service complet et sur mesure, en toute confidentialité et adapté aux besoins spécifiques de chaque client et de chaque projet.

Et pourquoi ACT food ?

ACT food et les cinq centres techniques présentent l’offre la plus riche en Bretagne, en matière de conseil et de développement dans plusieurs domaines pour l’agroalimentaire. Spécialisés chacun dans leur domaine spécifique, ils vous proposent une véritable complémentarité dans leurs compétences et mettent à votre disposition leur expertise adaptée en fonction de vos spécificités.

Réseau unique act food

Et, au-delà, de leurs expertises, ils se rencontrent, échangent et partagent leurs connaissances et leurs informations. Un véritable maillage pour le plus grand bénéfice de tous les clients avec comme valeurs confidentialité et indépendance.

 

Pour en savoir plus sur les prestations des centres techniques

Pour contacter directement ACT food

 

Les coproduits de la mer en chiffres

Selon FranceAgriMer (2023), les coproduits des filières bleues en France métropolitaine représentent plus de 210 000 tonnes par an. Environ 150 000 tonnes sont actuellement exploitées, laissant un potentiel de 60 000 tonnes encore inexploitées.

La filière poisson génère à elle seule 75% de ces coproduits, avec un taux de valorisation d’environ 90%. Bien que ce chiffre soit encourageant, la majorité est utilisée pour l’alimentation animale, un débouché à faible valeur ajoutée. Des initiatives dans la biochimie et les biotechnologies ouvrent la voie à une meilleure valorisation des arêtes, têtes, écailles et cartilages, promettant des applications à plus forte valeur ajoutée.